Rencontre avec Emilie Laystary, animatrice du podcast Bouffons
Après deux premières éditions, le Printemps du Podcast, festival libre et curieux du podcast et de la créativité audio revient du 18 au 21 mai 2022 à Ground Control. Rencontre avec Emilie Laystary, animatrice du podcast Bouffons. Bouffons décortique un sujet culinaire et sociétal avec un·e invité·e ou plus : chef·fe·s, professionnel·le·s, passionné·e·s mais aussi sociologues ou géographes, pour une discussion qui donne faim tout en donnant à réfléchir. Le 20 mai, elle sera avec nous pour un enregistrement live avec l’économiste Pascale Hobel. Pour s’inscrire, c’est par ici.
Qu’est-ce que prendre sa place signifie
pour toi ?
Cette question m’évoque une différence entre « prendre de la place », « prendre place » et « prendre sa place ». Dans le premier cas, on occupe un espace qui n’est pas nécessairement le nôtre, avec un risque d’empiéter sur celui des autres. Dans le second, on s’installe sur un siège libre pour se fondre dans une masse de spectateurs, par exemple. C’est seulement dans le troisième cas que l’on s’épanouit pleinement dans un endroit qui nous appartient, et qui nous « attendait », si l’on peut l’humaniser. Prendre sa place, c’est donc occuper un territoire unique, précieux, fort. Prendre sa place est une revendication, un acte d’émancipation.
Quel est le jour où tu t’es dis qu’il était temps de prendre sa place ?
Il y a en journalisme un mirage, une idée mensongère : l’objectivité. On nous fait souvent croire qu’un traitement absolument neutre de l’actualité est possible ; que cet horizon est une norme désirable et atteignable. Pourtant, la fabrique de l’info implique toujours d’opérer des choix et d’adopter des angles. On observe toujours le monde depuis un point de vue singulier. En tant que journaliste traitant de faits de société, j’ai réellement pris ma place en apprenant à me situer socialement — autrement dit, comme femme cis, hétérosexuelle, de nationalité française, d’origine vietnamienne, valide, ayant grandi dans une grande ville, diplômée… Ce qui implique tantôt des privilèges, tantôt des contraintes.
En quoi le podcast est-il un outil pour prendre sa place ?
Avec le podcast Bouffons, c’est la première fois dans mon métier que j’ai autant le sentiment de pouvoir laisser mes interlocuteur.rices s’exprimer en leurs noms propres. Contrairement à la presse écrite où c’est aux journalistes de restituer le propos, l’audio permet aux personnes concernées de dire les choses avec ce qu’aucun mot imprimé ne pourra retranscrire (un silence ému, une voix chevrotante, des hésitations, un ton affirmé…), le tout avec l’intimité qu’offre le dispositif du micro sans l’image, bien moins intimidant qu’une caméra. Grâce à ce médium, j’ai l’impression de pouvoir être humblement une « passeuse d’histoires ». Si la société était un restaurant, le milieu du podcast serait sûrement un genre de passe-plat !
Es-tu du genre à t’asseoir toujours à la même place ?
Autour d’une table, non. Sinon, comment regarder par la fenêtre ou observer les allers et venues en cuisine si l’on est toujours assis devant la porte d’entrée ? Quand je mange autant que quand je ne mange pas, j’aime multiplier les points de vue.
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